Retour sur le rapport de la Commission d’Enquête Parlementaire

Une commission d’enquête parlementaire (CEP) a été créée en mai 2021 à l’Assemblée Nationale sur « les migrations, les déplacements de populations et les conditions de vie et d’accès au droit des migrants, réfugiés et apatrides en regard des engagements nationaux, européens et internationaux de la France ».

A l’origine de cette commission, on retrouve cinq associations participantes au projet CAFI (La Cimade, Le Secours catholique, Médecins sans frontières, Médecin du Monde, Amnesty International) qui ont approché des groupes parlementaires afin de créer une commission d’enquête sur les atteintes aux droits fondamentaux des migrants présents dans les zones frontalières françaises.

Composée de trente parlementaires, la CEP a été présidée par Sébastien Nadot et Sonia Krimi en a été la rapporteure.

Le champ d’investigation de la CEP s’est révélé beaucoup plus étendu qu’aux seules zones frontalières.
En effet, l’exemple en est que Guillaume Rossignol et Pierre Nicolas de JRS France ont été auditionnés le 21 juillet 2021 dans le cadre de la CEP sur le thème de l’accès au travail et à la formation.

Lors de cette audition, il a été insisté sur la difficulté pour les personnes en demande d’asile d’accéder au marché du travail et sur le dénuement extrême que cette situation engendrait pour les personnes privées des conditions matérielles d’accueils ( cf document audition)
Le rapport a été publié le 10 novembre 2021 suite à un très grand nombre d’auditions. Le rapport est disponible via ce lien.

 On peut retrouver le compte rendu de ces auditions sur le site de l’assemblée nationale. Il comporte un long avant-propos du président de la CEP, se décompose en 3 parties et porte 30 recommandations. 

Voici les différentes parties :
Partie I : RÉGULER LES MIGRATIONS, UNE AFFAIRE « ÉTRANGÈRE ET EUROPÉENNE » PLUS QU’« INTÉRIEURE »

Partie II : ADAPTER NOTRE ORGANISATION POLITIQUE ET ADMINISTRATIVE À LA RÉALITÉ DES MIGRATIONS 

Partie III : L’ACCÈS DES PERSONNES MIGRANTES AUX DROITS SUR LE TERRITOIRE FRANÇAIS : UNE PROMESSE DE LA RÉPUBLIQUE INSUFFISAMMENT TENUE 

L’avant-propos est intéressant dans la mesure où il répond aux alertes que JRS France et les organisations avec qui nous travaillons n’ont eu de cesse depuis des années de dénoncer, à savoir le non-respect des droits fondamentaux des personnes migrantes. Son ton n’est pas neutre mais il est truffé d’informations intéressantes en matière de migration.

On retrouve notamment une revendication que nous portons à JRS France. Il s’agit de la recommandation n° 16 : « ouvrir la possibilité de travailler aux demandeurs d’asile, dès le dépôt de leur demande ».

Concernant la législation européenne, le rapport de la CEP revient sur le règlement Dublin en mentionnant qu’il reste en place faute d’accord entre Etats alors qu’il est dénoncé de toute part depuis plusieurs années.  

Depuis le contexte migratoire particulier à l’année 2015, l’Europe n’a pas avancé sur une réforme de la législation européenne en matière d’asile.

C’est dans ce contexte que le 23 septembre 2021, la Commission européenne a présenté le pacte sur la migration et l’asile avec 5 propositions législatives (cf page 73 du rapport).

Comme le soulève la CEP, il va être difficile d’arriver à un accord entre Etats. Il existe trois groupes qui n’ont pas les mêmes intérêts :

  1. Le groupe des pays demandant plus de solidarité, on y retrouve sans surprise les pays frontaliers d’arrivée :  Espagne, Italie, Grèce, Chypre, Malte.
  2. Le groupe des pays demandant plus de responsabilité, on y retrouve les 2 pays principaux de dépôt de demande d’asile à savoir la France et l’Allemagne.
  3. Enfin le groupe des pays réfractaires, avec là aussi sans surprise, les quatre pays dits de Visegrad (Hongrie, Pologne, Tchéquie, Slovaquie).

Plus récemment, suite à la situation à la frontière avec la Biélorussie, un communiqué de presse du 14 décembre 2021 de la Commission européenne fait état de nouvelles mesures à adopter dans l’espace Schengen pour le rendre plus résilient (https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_21_6821).

Il s’agit d’une proposition de règlement spécifique sur « l’instrumentalisation des migrants à des fins politiques » et une proposition de règlement modifiant le régime de franchissement des frontières par les personnes.

On retrouve l’idée de pouvoir examiner les demandes d’asile à la frontière de l’union européenne. Il s’agit de créer des « hots spots », des « zones d’attente », idée ancienne que l’on retrouve dans le pacte sur la migration et l’asile en ces termes explicites :

« La Commission propose de mettre en place une procédure fluide à la frontière, applicable à tous les ressortissants de pays tiers qui la franchissent sans autorisation et comprenant un filtrage préalable à l’entrée, une procédure d’asile et, s’il y a lieu, une procédure de retour rapide, intégrant ainsi des processus qui sont actuellement distincts »

Comme il est mentionné juste après, il s’agit de filtrer les personnes dont celles qui seraient « des faux demandeurs d’asile », notamment les ressortissants des pays qui ont un faible taux de reconnaissance de protection (https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?qid=1601287338054&uri=COM%3A2020%3A609%3AFIN)

Retour en haut